Ils en rêvent toute l’année, le préparent minutieusement, se projettent dans cette montagne corse lointaine et mystérieuse qui a acquis la réputation mondiale d’être d’une beauté féérique.
Ce rêve a un nom, c’est notre « frà li monti », le très célèbre GR 20.
La naissance d’une réalisation résulte toujours d’un duel entre les pessimistes ; les sceptiques, ceux qui disaient que ça n’intéresserait tout au plus que 15 personnes par an ; et les optimistes, ceux convaincus du succès à venir, prêts à relever 1000 défis.
Quelquefois les optimistes l’emportent et le GR 20 aujourd’hui est un réel succès. Ce sont de 15 à 20 000 randonneurs par an qui l’empruntent, pour un nombre estimé à 80 000 nuitées sur les refuges du P.N.R.C. (chiffres de 2013)
La réussite d’un tel projet est forcément la résultante d’une œuvre collective, liée à la création du Parc Naturel Régional de la Corse officialisé le 12 mai 1972.
Un parcours dans le milieu montagne sur une longueur de 200 km de Calenzana à Conca, sur la ligne de partage des eaux entre Cismonte et Pumonte, il chemine souvent à une altitude de 2 000 mètres, avec une somme de dénivelés positifs de 10 000 mètres. Le GR 20 est conçu pour être parcouru en 15 étapes. Ce sont les refuges du Parc qui permettent les nuitées et le ravitaillement, auxquels se rajoutent les bergeries et les hôtels qui se trouvent sur le parcours.
Les sorties en montagne ne s’improvisent pas, elles nécessitent le respect des règles de prudence, des connaissances, un équipement conséquent et une bonne préparation physique. Il est conseillé dans certains cas de faire appel à un guide de moyenne montagne. Des liaisons permettent d’ailleurs de sortir de l’itinéraire en cas de difficultés.
Ce milieu de montagne avant d’être celui des sportifs et des randonneurs est un haut lieu du pastoralisme, c’est celui des bergers qui le pratiquent depuis des temps immémoriaux. Les recherches récentes en archéologie situent l’importation du mouton, de la chèvre, du porc, du chien autour de 5400 avant notre ère.
L’invention de l’agriculture et de l’élevage, souvent appelée révolution du néolithique, nait en Mésopotamie. L’élevage des ovins et des caprins dans les monts Zagros remonte à 10 000 ans. Elle pénètre le continent Européen en remontant le Danube et les îles de la Méditerranée par la navigation de cabotage. Elle arrive en Corse et en Sardaigne vers 5 800 ans avant notre ère et est à l’origine de la sédentarisation et de la constitution des premiers villages.
Il faut donc imaginer la plaine, a piaghja en relation avec la Méditerranée comme un territoire associé à son arrière-pays, les bergeries d’estives, i stazzi.
Aujourd’hui les bergeries situées sur le GR 20 participent à l’hébergement qu’elles complètent avec leurs offres de produits identitaires, ce qui permet de relier des activités contemporaines à l’histoire, qui elle s’inscrit dans le temps long.
Le GR 20 reste une aventure qui ne laisse personne indifférent. Au-delà de l’aspect sportif ce sont des liens qui se créent, des partages, de la convivialité, des amitiés qui naissent, des histoires qui marquent les esprits, des souvenirs que l’on emporte avec soi, et que l’on garde parfois toute une vie.
Malgré les souffrances liées à pénibilité de milieu rude qu’est la montagne corse, quand on a eu la chance de le parcourir au moins une fois dans sa vie, une seule idée nous obsède, celle de le refaire dès que possible.
C’est ainsi qu’un bon nombre de randonneurs le refont, tel un virus qui nous gagne, celui du plus beau chemin de grande randonnée, u nostru caru frà li monti.
Induve tandu ci eranu muntoni è capre oghje ci sò turisti. Vennenu d’ogni locu, d’Auropa è ancu qualchì Canadianu. I lochi di pascu, di i stazzi di a muntagnera sò oramai investiti da gruppi chì parlanu di u « géhervin ». Dicenu chì sò e più belle muntagne, chì tuttu l’annu chjosi in ‘sse città incatramate sognanu di spassighjà per ste custere. Chì idee stranne d’attipà per u piacè per ‘sse cullate. Mi ramenta chì l’antichi dicianu chì ghjera straziu, è ch’elli u facianu per campà. Core apress’ à l’animali, esse di ritornu per l’ora di a munta. Oghje à a listessa ora sbarcanu sti spassighjanti per manghjà, dopu avè betu una « pietrà ». Cusì và u mondu a rissorsa d’eri hè sempre una risorsa oghje, ci vole ghjustu à abituassi à stu scambiamentu, u tempu chì fù, mai più ùn tornerà.