27 septembre 2024

A Tumbera, aldilà d’un ghjornu

En ce mois de décembre, le village se prépare à l’un des événements les plus attendus de l’année : a tumbera, la tuaison du cochon domestique. C’est un rituel ancestral, profondément ancré dans la vie villageoise, où la viande et la graisse de l’animal seront transformées en nourriture pour l’année à venir. La tuaison se déroule souvent peu avant Noël, permettant ainsi aux villageois de savourer le boudin et toutes les parties périssables du cochon lors du repas de fête.

L’allevu

L’élevage des cochons suit deux pratiques distinctes. D’une part, il y a les cochons familiaux, engraissés au village, parfois laissés au purcaghju. D’autre part, il y a les cochons élevés en liberté dans la forêt, sous la surveillance des purcaghji, qui veillent à ce que leurs animaux n’envahissent pas les châtaigneraies pendant la récolte. Chaque famille, dans cette économie traditionnelle et paisana, élève un ou deux cochons appelés casarecci ou mannarini, achetés jeunes en mars et engraissés jusqu’à la tuaison.

Le casarecciu est nourri principalement avec les restes de cuisine, ce qui le rend extrêmement familier des habitants du village. Circulant librement, il devient presque un membre de la communauté. En revanche, les porchi di banda, vivant en liberté, se nourrissent de ce qu’ils trouvent en forêt.

Ghjornu di tumbera

Le jour de la tumbera, l’air est chargé d’excitation. Tout le monde se rassemble. L’ambiance est à l’entraide, la véritable uparata paisana, où chaque famille apporte son savoir- faire et ses outils pour participer à cette grande entreprise collective.

Deux méthodes traditionnelles d’abattage sont employées : soit le cochon est suspendu vivant par les pattes arrières et saigné avec un long couteau (pulzatu), soit il est couché et poignardé au cœur (impentatu). Cette tâche, lourde et délicate, est confiée à un expert, le pulzatori, qui sait faire couler le sang avec précision. Le sang, recueilli dans un cunconu, est battu, salé et mélangé avec du vinaigre pour éviter qu’il ne caille. Il sera utilisé pour faire des boudins (i sangui) ou du ventre farci (u ventru pienu). Après l’abattage, vient le nettoyage de la peau. Alors, le cochon est recouvert de murza (immortelle) ou d’une autre plante, qui sera enflammée pour brûler les soies de la peau (uscià u purcellu) et enlever les ongles des pieds (l’unghjoli). Les flammes sont laissées quelques minutes avant que la peau ne soit soigneusement grattée avec un couteau.

L’animal est ensuite nettoyé à l’eau chaude et frotté avec une pierre.

A robba

Une fois la peau propre, le cochon est posé ou accroché pour être éventré et dépecé. Les abats sont mis de côté, tandis que les boyaux sont retirés et confiés aux femmes pour le lavage. Ces dernières enlèvent le gras entourant i trippi, qui peut être transformé en sdruttu (saindoux) et en ragnuli (rillons). Les boyaux, retournés et méticuleusement lavés à la rivière, seront ensuite utilisés pour la charcuterie. La carcasse du cochon est fendue en deux et mise dans un endroit abrité et froid, permettant à la chair de se raffermir avant le découpage. Les différentes parties de viande sont alors soigneusement triées : i prisutti (les cuisses), a coppa et u lonzu (la longe) ; a panzetta (la poitrine), a vuletta (la bajoue) et u lardu sont salés, poivrés et fumés. La charcuterie est ensuite liée, piquée puis accrochée et enfumée.

La viande maigre sert à fabriquer i salcicci (les saucisses), la chair étant hachée (tazzata, macinata) à la moulinette puis remplie dans les boyaux à l’aide d’un entonnoir. Le foie est réservé pour le ficatellu, tandis qu’u frumagliu di porcu (le fromage de tête) permet d’utiliser d’autres parties moins consommées autrement, comme les pieds et la tête.

Sanu sanu

Même la vessie est utilisée, remplie de graisse, de poivre et d’aromates. Rien ne se perd dans ce processus, pas même le pénis du cochon, qui sert de chevillette aux portes des maisons, et la peau, transformée en sac, a narpia, où l’on voyait l’amorce des quatre membres du mannarinu.

D’un mannarinu bien gras, on tire divers produits : dix kilos de sangui et ficatellu, trente kilos de lardu, deux prisutti, six kilos de salciccia, vingt-cinq kilos de viande à fumer et cinq kilos de saindoux. Lorsqu’un cochon est tué à une autre période que Noël, i sangui sont redistribués aux paisani, renforçant les liens d’amitié et de solidarité au sein de la communauté.

Ainsi, la tumbera n’est pas seulement un moment de travail ardu, mais aussi une célébration communautaire, un témoignage de l’entraide et de la solidarité des villageois, où chaque geste et chaque détail sont empreints de tradition et de respect pour l’animal. Le repas festif qui suit clôt cette journée de manière conviviale, rassemblant tout le village autour de mets savoureux et de récits partagés.

Traduzzione in lingua corsa

Di dicembri, ghjunghji a tumbera. Faci parti di sti stondi sparti trà paisani chì ritimani a vita di u paesi. U mannarinu, chì hè statu alivatu dipoi u mesi di Marzu hà da fà l’ultimu viaghju è divintà salameria. Mentri a tumbera, ognunu trova u so rolu, à chì polza, à chì brusgia, à chì lava… Da un mannarinu, sò parechji dicini di robba chì ni sarani tirati. Sta robba sarà magnata à u filu di l’annu..

Testu : Stephane Dinelli

By Categories: Patrimoniu