Ghjuvan’Federiccu Terrazzoni : Comment est né chez vous le goût de la poésie et la chanson ?
Patrizia Gattaceca : Des berceuses de ma mère aux chants et à la musique des hommes de la maison, du cri des animaux, aux bruits de la nature durant mes longues promenades avec mon grand-oncle berger et musicien, la poésie, le chant, la musique ont fait partie de ma vie dès ma plus tendre enfance, envahissant mon quotidien et stimulant mon imaginaire. Je suis consciente que cet héritage m’a beaucoup apporté et m’a aidé à me construire, c’est une grande richesse.
G.F.T. : Comment décririez-vous votre style musical et vos influences ?
P.G. : Mes influences sont multiples. Il y a d’abord cette tradition transmise par ma famille qui va de la paghjella aux chansons des années 50, 60, celles des Frères Vincenti, d’Antoine Ciosi, entre autres, mais aussi des guitares, mandolines et banjos, inspirés du style corse né avec Paulo Quilici et d’autres. D’autre part, il y a la musique folk, pop et rock des années 70 et tout ce qui suit car j’aime la musique dans tous ses styles. J’aurais du mal à définir mon propre style car mes chansons s’inspirent de tout cela et j’aime proposer à chaque fois quelque chose de différent, faire en sorte que mes albums ne se ressemblent pas même si on y reconnait ma patte. J’aime aller puiser au fond de moi, dans ce mix de styles et de courants musicaux, j’aime aussi dans mes chansons mélanger les langues parfois, même si le corse reste la première langue de mes textes.
G.F.T. : Quel est votre processus de création lorsque vous écrivez ?
P.G. : Je n’ai pas une méthode particulière pour écrire mais j’écris beaucoup dans ma tête avant de coucher mes vers sur le papier, d’organiser mon propos et de mettre en œuvre différents principes esthétiques. L’inspiration, je la trouve partout. La vie, le quotidien, les gens, la nature, les sentiments (Di filetta è d’amore, Passagera), les lieux, la mémoire, l’histoire (Terra Nostra). J’aime aussi m’inspirer d’œuvres littéraires (Carmini inspiré de Charmes de Paul Valery, Meziornu inspiré de L’Aretta bianca de Jacques Thiers ou encore L’épopée du Digénis Akritas), de grands mythes ou de textes fondateurs (A cerca ou le parcours de Noé le patriarche). Très prochainement paraîtra U cantu di i canti inspiré du Cantique des Cantiques (Livre de la bible).
G.F.T. : Y-a-t-il un message ou un thème récurrent dans vos créations ?
P.G. : Je ne pense pas, j’aborde plusieurs thèmes, parfois le message est clair, il peut être sous-jacent mais je ne cherche pas forcément à délivrer un message. Pour moi le vrai message c’est la poésie elle-même. Le poème est pour moi une sorte d’obsession, c’est d’ailleurs ce que j’ai voulu exprimer dans mon ouvrage Paesi ossessiunali .
G.F.T. : Quelle est votre chanson préférée que vous avez écrite et pourquoi ?
P.G. : Toutes, elles représentent un chemin, une démarche, l’effort, la douleur, la délivrance.
Le processus est toujours le même et les émotions aussi.
G.F.T. : Pouvez-vous nous parler de votre dernier livre et de ce qui l’a inspiré.
P.G. : Seranu puesiole/La traversée (Albiana), qui a obtenu en 2023, le Prix du livre corse réunit les textes de mes cinq derniers albums ainsi que leur traduction. J’y explique ma démarch. On y trouve des chroniques d’albums, des notes explicatives etc…Cet ouvrage nous propose un tour de la Méditerranée, en différentes langues. Comme je l’avais fait dans Cantu in Mossa, j’ai voulu à travers cette petite anthologie interroger encore une fois le lien entre le poème et le chant si particulier chez nous.
G.F.T. : Quelle est votre expérience préférée en tant que chanteuse et autrice jusqu’à présent ?
P.G. : Celle que je vis au quotidien, la chance de pouvoir chanter, écrire, m’exprimer par mon art.
G.F.T. : Quels conseils donneriez-vous aux jeunes artistes qui aspirent à suivre vos traces ?
P.G. : Le travail, la recherche du beau. Ne pas se contenter du peu, aller au fond des choses. Quand on parle de création on parle d’un chemin souvent difficile, semé d’embuches et surtout de doutes mais c’est ainsi qu’on avance car nous devons rester humbles face à cette création qui nous dépasse. Nous avons tous toujours des choses à apprendre et c’est une vraie chance..
Patrizia Gattaceca hè un artista à i middi sfumaturi chì sà passà da un modu di sprissioni à l’altru incù u stessu galabu è a stessa maistrìa, à quandu pueta, musicanti, cantarina o cummidianti, tuttu li veni naturali. Sempri in circa di l’armunìa chì trafranca i cunfini di l’essa, u so arti ùn cunnosci fruntieri, è libara di crià, faci d’ugni novu prughjettu una sfida è una làscita da rigalacci à cori apartu. V’eccu un assaghju d’una raghjunata insembu.