Tout le monde connait le nom de Tino ROSSI et au moins une de ses chansons : Petit Papa Noël, qui demeure encore aujourd’hui la plus vendue de l’histoire en France.
Né Constantin ROSSI, à Ajaccio, le 29 avril 1907, au 43 rue du Cardinal Fesch, il fait partie d’une fratrie de huit enfants et porte le nom d’un de ses frères mort en bas âge. Il est pour ses parents l’enfant « consolateur. »
Le petit Tino chante tout le temps, aussi loin qu’il se souvienne. Soit pour bercer sa petite sœur Laurence, soit dans la chorale de l’église Saint-Roch ou encore dans les bars de la ville avec ses amis.
Son père, Laurent, est tailleur. Passionné de bel canto et d’opéra, il emmènera souvent le jeune Constantin applaudir le grand ténor Bastiais César VEZZANI au théâtre d’Ajaccio.
Sa mère, Eugénie, principalement occupée par son rôle de mère au foyer, aide son mari dès qu’elle le peut à l’atelier familial ; où il est aussi d’usage de chanter en travaillant. Une des cousettes1 révèlera plus tard pour un éditorial parisien : « Comme nous chantions toute la journée en tirant l’aiguille, Tintin joignait sa voix aux nôtres. Les chansons d’amour l’émouvaient autant que nous. Il lui arrivait de pleurer, tant il était sensible… »
Etudiant au collège Fesch, il fut remarqué pour ses talents de fugueur… Préférant de loin l’école buissonnière à la rigueur des études qui l’ennuyaient profondément. Il rejoignait parfois les muletiers sur leur parcours afin de chanter avec eux.
À dix-huit ans, il tombe amoureux de la jeune violoniste Anne-Marie MORNAND, de passage à Ajaccio pour une représentation au café Napoléon. Il décide de la suivre sur la côte d’Azur et de l’épouser. De cette union naitra leur fille Pierrette.
Après son service militaire dans les chasseurs alpins, Tino peine à trouver un emploi. Anne-Marie demande le divorce. Il rentre alors en Corse pour travailler au casino d’Ajaccio où il rencontre Faustine FRATANI, qui deviendra sa seconde épouse.
Ils décident de tenter leur chance sur le continent et s’installent d’abord à Marseille puis à Aix-en-Provence.
Tino enchaine encore de petits boulots : voiturier, portier, plongeur… Son seul réconfort est de retrouver les étudiants corses de l’université pour chanter avec eux dans les bars.
C’est ainsi qu’il sera remarqué et mis en relation avec le producteur de tournée, Louis ALLIONE.
Très timide en dehors de son cercle de proches, Constantin fera ses débuts sur de petites scènes de l’arrière pays provençal. C’est là qu’il choisira son nom scénique, en souvenir de l’évêque de Corse qui avait marqué une césure en prononçant son prénom « Constan-Tino2 » lors de sa confirmation.
Il enregistrera son premier disque à Paris chez Parlophone en 1932 : O Ciucciarella. Ce qui en fait le premier disque de chansons corses jamais gravé !
Après un passage au prestigieux Alcazar de Marseille, il signera un contrat chez Columbia en 1933.
Les années de vaches maigres sont définitivement derrière lui.
Il se présente en 1934 au Casino de Paris, foulard rouge, chemise blanche et guitare à la main pour chanter deux chansons de son ami et parolier Vincent SCOTTO : «Ô Corse île d’amour» et «Vieni, vieni», qui eurent un franc succès.
Son physique de « latin lover » plait énormément aux femmes et c’est sans doute l’une des clés de son succès. Première idole de la chanson française, ces dames s’approchaient de lui avec « férocité », lui témoignant d’innombrables marques d’affections, donnant lieu à des scènes surréalistes pour l’époque.
Il fera plusieurs apparitions au cinéma, donnera des représentations aux Etats-Unis, au Canada, en Allemagne. Il rencontrera l’actrice Mireille BALIN sur le tournage de «Naples au baiser de feu», en 1937. Il vivra avec elle un amour passionné et très médiatisé qui mettra fin à son mariage avec Faustine.
Pendant la guerre, les enregistrements et les tournages se poursuivent en zone libre.
En 1941, Mireille et Tino se séparent. Elle connaitra de son côté un destin des plus tragiques…
Quelques mois plus tard, il fera la connaissance de la danseuse Niçoise Lilia VETI (Rosalie CERVETTI), qui deviendra sa troisième épouse et « l’amour de sa vie ». Ils auront un fils : Laurent Emmanuel.
Sous l’occupation, Tino chantera à plusieurs reprises «Quand tu reverras ton village», considéré comme un chant d’espoir pour les prisonniers de guerres. D’après son père, il refusera de nombreuses fois de chanter «Maréchal, nous voilà !».
Cible d’une machination policière en 1944, il sera incarcéré pendant trois mois à la prison de Fresnes au motif « d’un comportement anti français. » Exempté de toute poursuite, son accusation sera jugée sans fondement.
C’est peut-être pour laver cette injure qu’il sera fait Chevalier de la légion d’honneur en 1953, puis Officier en 1975 et enfin Commandeur3 en 1982 par François Mitterrand.
Il remontera symboliquement sur les lieux de ses débuts, le Casino de Paris, en 1982 pour fêter ses cinquante ans de carrière et s’éteindra le 27 septembre 1983 des suites d’une opération du cancer du pancréas. Il y a déjà quarante ans…
Très attaché à son île. Tino revenait toujours se ressourcer dans sa villa en Corse, son « havre de paix. » Jamais il n’oublia ni son pays, ni sa langue, ni les rues qui l’ont vu grandir où on l’appelait simplement Tintin.
1 Désignait autrefois une jeune apprentie de la couture.
2 L’italien est resté d’usage dans les églises de Corse jusqu’en 1938.
3 L’Ordre national de la légion d’honneur comprend cinq grades : chevalier, officier, commandeur, grand officier et grand-croix.
Sources :
– Tino Rossi d’Emmanuel Bonini
– https://tinorossi.monsite-orange.fr/index.html
NB : À l’occasion du 40ème anniversaire de sa mort, la ville d’Ajaccio a mis en place une exposition place Foch, du 10 août au 20 septembre, avec conférences, projections et concerts en son honneur.
Traduzzione in francese
Natu in Aiacciu u 29 d’aprile 1907, Constantin ROSSI (dettu Tintin), facia sente a so voce ind’i carrughji di a cità imperiale. Prima ind’è l’intima tenerezza di a so stanza zitellina da annannà a so surelluccia, sin’à l’usterie cù i s’amichi, passendu da i canti chjisani. Tino cantava sempre è da sempre. È s’ellu cunniscì un tempu periudi di caristia, diventò prestu a figura internaziunale chè nò cunniscimu. Eppuru, mai ùn si scurdò di e so radiche è di i so lochi, induve ci si firmava torna appena di a so zitellina. Si spense u 27 di sittembre 1983, quarant’anni fà…